Déclaration de la FSU, avec la CGT Educ’action et le SNUDI-FO

Depuis le début de la crise, les enseignants, les enseignantes ont à cœur de continuer à faire fonctionner le service public d’éducation. Nous ne comptons ni notre temps ni notre engagement. En mars, malgré la stupeur générale, nous avons inventé, imaginé, tâtonné pour maintenir un lien entre l’école et nos élèves. Nous avons accueilli dans les écoles, sans protection aucune, les enfants des personnels prioritaires. (Rappelez-vous : à cette époque les masques ne servaient à rien !) En mai, à la surprise générale, nous avons rouvert nos écoles et nos collèges, en mettant en place en quelques jours un protocole hautement drastique, à l’encontre de toutes les valeurs émancipatrices de l’école que sont le partage, l’entraide, la socialisation… Et cela malgré les mensonges et les campagnes diffamatoires sur notre profession : les fraises, les profs décrocheurs… Depuis le mois de septembre, nous tenons à bout de bras une école qui se porte de plus en plus mal. Et aujourd’hui, la colère, la fatigue et le sentiment de mépris n’ont jamais été aussi forts et présents dans la profession !

Face à l’irresponsabilité de notre ministère, les enseignants, les enseignantes  sont épuisé·es de « bricoler » autour d’un protocole sanitaire qui nie les réalités de l’école. Il est impossible de maintenir, dans nos classes surchargées par des années de gestion comptable de l’école, le fameux mètre de distance ! Le ministre le dit lui-même dans son protocole : “si la configuration des salles de classe ne permet absolument pas de respecter la distanciation physique d’au moins un mètre, alors l’espace est organisé de manière à maintenir la plus grande distance possible entre les élèves.”
L’impréparation et le manque de moyens conduisent à une impossibilité de mener nos missions d’enseignement tout en garantissant la protection de toutes et tous , dégradent les conditions de travail de l’ensemble de la communauté éducative ( enseignants, agents, aesh, aed dans les établissements du secondaire). L’organisation des repas dans les cantines est le point noir dans tous les établissements. Des centaines d’élèves s’y mélangent, sans masque, réduisant à néant les efforts fait par ailleurs. La pression sur les agents et les AED à qui l’on demande l’impossible met les équipes dans une situation intenable.

Le manque de moyens de remplacement, le maintien des activités telles que la natation à plusieurs classes, le nombre élevé d’élèves par classe… Tous ces éléments révèlent l’incohérence des injonctions, empêchent l’école de fonctionner correctement et rendent impossibles la limitation du brassage, la constitution de petits groupes d’élèves ou la distanciation physique.

Pour autant c’est à l’école que les enfants doivent se trouver ! La “continuité pédagogique” chère à notre ministre n’est qu’un écran de fumée qui fait partie de sa stratégie communicationnelle ! Nous ne revendiquons pas une fermeture totale de tous les établissements, parce qu’en qualité de professionnel·les nous connaissons les conséquences  sociales et scolaires d’un confinement total. Ce que nous demandons ce sont des moyens, notamment des moyens humains : des professeurs supplémentaires pour pouvoir accueillir nos élèves en toute sécurité, mais aussi des personnels de vie scolaire dans le second degré, des agents pour assurer toutes les procédures de nettoyage et de désinfection, des infirmières scolaires, des assistantes sociales… Ce dont nous avons aussi besoin, c’est de temps pour mettre en place en équipe des protocoles qui collent à la réalité de nos écoles et de nos établissements. À l’inverse, aujourd’hui ce sont les revirements incessants, les effets d’annonces ministérielles changeantes qui dominent et sont dans le déni de l’engagement quotidien des enseignants·es. Les ordres et les contres ordres ne sont que source de désordre.
Le ministre a enfin ouvert la porte à un fonctionnement en demi-groupe en lycée : cette ouverture est à mettre au crédit de la mobilisation des personnels et des élèves, en particulier depuis lundi 2 novembre. Si le ministre se préoccupe des problématiques du lycée en renonçant aux Évaluations Continues, l’école et le collège restent oubliés et de nombreuses revendications restent sans réponse.

Les parents d’élèves sont loin d’être dupes de ce qui se passe et ils nous soutiennent pleinement. Ils perçoivent bien la complexité de mettre en œuvre un protocole sans cesse modifié, toujours à la dernière minute. Ils perçoivent bien les difficultés pédagogiques et sanitaires des masques imposés aux élèves, en particulier celles posées dans l’apprentissage du langage chez les plus jeunes (cp et ce1 surtout).

Plus largement, c’est d’un vrai plan de relance dont ont besoin tous les services publics. La “crise”actuelle démontre de manière indiscutable que le capitalisme néolibéral comme dogme des politiques publiques est mortifère. On ne peut continuer à nous faire croire qu’il faut “réduire les coûts” en supprimant des emplois et des financements publics alors qu’on sert sur un plateau des cadeaux fiscaux aux plus riches et aux plus grandes entreprises sans aucune contrepartie. En pleine crise sanitaire, le gouvernement poursuit sa politique de suppression de postes dans l’Éducation (1800 postes en moins pour le 2nd degré pour 20 000 élèves de plus). C’est bien cette politique qui a amplifié cette crise car nos hôpitaux exsangues sont dans l’incapacité d’y faire face. C’est la démonstration que les services publics ne sont pas un coût mais bien une richesse et une nécessité absolue en ces temps où les effets des bouleversements climatiques se font également de plus en plus sentir. L’État se doit de protéger l’ensemble de la population !


Ci-dessous la déclaration au format pdf pour affichage ou diffusion numérique :